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Sarajevo était assiégée depuis 15 mois lorsque nous y sommes entrés, premier groupe de civils à pénétrer dans la capitale bosniaque, en août 1993. Peace Lines est née cette année-là, sur l'étroite piste de montagne, la "Route Diamant", sous contrôle des Nations-Unies, qui seule reliait Sarajevo au monde extérieur. Il nous est apparu très tôt que l'aide humanitaire (vivres, couvertures, vêtements, médicaments) ne pouvait rien résoudre. Il était impératif, par-dessus tout, d'obtenir le silence des armes. Pour cela, nous avons contribué au rapprochement entre les Croates de Bosnie Centrale et leurs adversaires de Travnik et Zenica, jusqu'au cessez-le-feu de février 1994. Sur l'autre versant du conflit (serbo-bosniaque), il fallait que des voix fortes, reconnues, soient entendues.

 

 

C'est alors que nous avons lancé notre première campagne pour un cessez-le-feu définitif, avec 33 Prix Nobel (parmi lesquels Mère Teresa, Mgr Tutu, le Dalaï Lama, Elie Wiesel, Yitzhak Rabin, Vladimir Prelog, Jean Dausset, Rita Levi-Montalcini, et les Présidents Arafat, de Klerk, Gorbachev...) et autres personnalités (Coretta Scott King la veuve de Martin Luther King, Joan Baez, Martin Gray, Jules Roy...), plus 7 parlementaires européens. Cet Appel a été diffusé en boucle, sur la plupart des chaînes radio et télé, bosniaques, croates et serbe, à partir d'avril 1995, à Zenica, Sarajevo, Kiseljak, Mostar, et Palé.

 

A travers les lignes de front nous avons aussi distribué quantité de textes en anglais, et traduits en serbo-croate, de Jean Giono, Henry Thoreau, Antoine de Saint-Exupéry, Stanley Milgram, William Blake, Léo Ferré, Bob Dylan, U2... Pourquoi des livres ? "Nous en avons assez d'être pris pour des tubes digestifs!" nous avait dit M. Kresevljakovic, le maire de Sarajevo en 1993. A Vitez, Vladimir Batinic, père du dernier tué du conflit croato-bosniaque, Mario, âgé de 11 ans, a enregistré un message pour Martin Gray : "Durant le siège de Vitez, c'est la lecture de votre livre, Au nom de tous les miens, qui m'a sauvé la vie, après la mort de mon fils."